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Enrique Dussel, Université de Mexico.

« Démocratie participative et représentativité »

Jeudi 26 avril 2012.

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J'aimerais que cette contribution puisse servir comme matériel pour la discussion des groupes « d’indignés ». Elle a sans doute une prétention de vérité mais ne prétend pas imposer, dogmatiquement, des sujets étrangers, latino-américains. Je pense simplement qu'elle peut être utile, comme bois destiné à être consommé dans le feu du débat communautaire.

 

Certains thèmes, développés à partir de la praxis politique actuelle en Amérique latine, font aujourd'hui l’objet de débats théoriques, en philosophie politique. Ces débats théoriques, auxquels participent des penseurs latino-américains et européens, influencent, à leur tour, la praxis politique concrète. Les agents politiques, les citoyens, les militants les représentants, appuient, explicitement ou implicitement, leurs pratiques politiques sur ces fondements théoriques. Par exemple, la démocratie représentative libérale est souvent présentée comme la démocratie pure et simple. Ces diagnostics théoriques, très discutables, déforment les pratiques politiques, éparpillent les efforts des militants (orientés pourtant, de façon idéaliste, par des principes généreux, même s'il ne faut pas oublier que « le chemin de l'enfer est pavé de bonnes intentions »), et ne rendent pas possible la création des institutions politiques pourtant nécessaires. Nous allons donc réfléchir sur quelques-uns des sujets qui retiennent actuellement les volontés politiques en les empêchant d'agir de façon plus créative, active, homogène et claire.

En général, on pense que certains mots sont antagoniques ou contradictoires, par exemple :

1. Démocratie participative versus démocratie représentative.

C'est à l'évidence une antithèse. Or, l'important n'est pas de montrer leur contradiction mais la nécessité de les articuler dialectiquement de sorte qu'un terme enrichisse l'autre et que les deux arrivent à se définir mutuellement. Nous dépasserons ainsi l'opposition, le « mauvais infini » de Hegel, en les subsumant dans une articulation qui les inclut dans une totalité dialectique plus riche. L'intention de ce travail sera donc de mettre en relation ces deux termes comme complémentaires et non pas comme antagoniques :

1. Démocratie participative articulée avec démocratie représentative.

On pourrait énoncer notre thèse de la façon suivante : La représentation s'institutionnalise en tant que délégation ; la participation s'exerce en acte et peut-être institutionnalisée. Il existe un potestas participatif. La fonction représentative est le gouvernement, c'est-à-dire la réalisation de contenus (moment matériel) ; la participation est propositionnelle < une force de proposition> (elle fait connaître et exige la satisfaction des besoins ou des demandes) elle est aussi instance de contrôle (elle surveille comme le panoptique, puni[1], ou au contraire reconnaît et récompense les mérites), la participation est le moment formel de légitimation.

Les partis politiques sont des médiations institutionnelles liées à la représentation ; la participation, elle, part du bon jugement, du sens commun des citoyens, et ne s'identifie pas avec les partis (elle est antérieure aux partis et plus importante qu’eux).

La participation critique, institutionnalisée, n'a pas besoin du parti (même si elle ne le refuse pas par principe), dans la mesure où elle est  mouvement, médiation nécessaire pour la critique, la transformation et le contrôle des institutions de la représentation (et de l'État).

La démocratie participative a une priorité absolue sur toute « délégation » du pouvoir, c'est-à-dire sur la Démocratie représentative. Nous allons prouver qu'effectivement la démocratie participative est l'essence même de l'exercice du pouvoir, absolument antérieure à toute délégation (ce que nous avons nommé potestas[2]).

À partir de certains exemples de Républiques où les citoyens participent (par exemple Venise) ainsi que de la lutte de la bourgeoisie contre l'aristocratie (lutte appuyée par la monarchie absolue), la modernité va faire naître différents types de démocratie représentative. La constitution nord-américaine fut la première dans son genre. En revanche, le parlement anglais, malgré le fait que la bourgeoisie exerçait effectivement le pouvoir, était encore une institution représentative d'appui à la monarchie (même si elle commençait déjà, d'une certaine façon, à la diriger). La modernité propose donc, contre le pouvoir de l’aristocratie féodale en pleine décadence, une démocratie représentative, manipulée par la bourgeoisie, qui évite soigneusement d’accorder la participation au peuple (même celui des villes), aux ouvriers, aux paysans, aux femmes et en général à tous les secteurs dominés de la société civile. Même dans les cas où elle autorise une participation, elle le fait d'une façon telle que les mécanismes de la représentation lui permettent de maintenir son hégémonie.

Cette origine de la démocratie représentative explique que les mouvements contestataires politiques, revendiquant certains aspects anarchistes, considèrent que le gouvernement adéquat et juste pour le peuple c'est la démocratie participative directe et non la représentation bourgeoise et sa prétention d'universalité. C'est ainsi que va naître la fausse antinomie entre une position de réalisme politique qui défend la démocratie représentative (et son aboutissement dans le libéralisme) et le choix de l'utopie, irréalisable, défendue par l'anarchisme. L'alternative est : ou bien être libéral et appuyer la démocratie représentative comme forme de gouvernement, ou bien être révolutionnaire (ou anarchiste) et appuyer la démocratie participative.

Néanmoins, chacun des termes, considéré de façon isolée, est inadéquat et insuffisant. Leur opposition n’est qu'une fausse contradiction. Les deux sont en rapport et mutuellement co-déterminés ; chacun a besoin de l'autre. Loin d'être en contradiction ils sont les deux moments nécessaires pour une définition minimale et suffisante (nécessaire) de la démocratie.

Depuis toujours, dans toute la pensée de la modernité,

a) la démocratie représentative libérale a montré (et montre de plus en plus), ses défauts. Ces défauts atteignent aujourd'hui leur point culminant dans l'exercice du pouvoir représentatif délégué de l'État, dans le fétichisme monopoliste des partis politiques et leur corruption.

b) En même temps, l'idéal d'une pleine démocratie participative n'a jamais été institutionnalisé de manière effective dans la mesure où elle a été monopolisé par des positions anarchistes extrêmes. Or, chaque fois qu'on a essayé un gouvernement de démocratie directe exclusivement fondé sur une communauté en assemblée permanente, l'impossibilité factuelle de ces expériences a été démontrée (quelques mois lors de la commune de Paris ou une période un peu plus longue pour les soviets en Russie).

Nous pensons que l'articulation de ces deux moments (participation et représentation), c'est-à-dire une démocratie à la fois possible et légitime est le moyen de dépassement de la politique bourgeoise moderne. Elle est sans doute le dépassement du socialisme réel du XXe siècle qui, dans la plupart des cas, n'a représenté aucune forme de démocratie, ni participative ni représentative. Les formulations ambiguës de « dictature du prolétariat » ou de « centralisme démocratique », ne représentent, objectivement, aucune forme de démocratie. Il faut instaurer un nouveau modèle de système politique, susceptible de s'articuler avec une civilisation trans-moderne et trans-libérale (et aussi trans-capitaliste du point de vue économique). Il ne s'agit pas d'améliorer le libéralisme ; il s'agit de partir de nouveaux présupposés et d'articuler la participation avec la représentation d'une façon que les régimes libéraux n'ont jamais imaginé (jamais imaginée, non plus, par l'anarchisme). C'est la révolution politique par excellence, l'équivalent politique de la mise en commun des moyens de production et de gestion de la révolution économique proposée par Marx. C'est la révolution politique que Marx lui-même n'a pas formulé, dans la mesure où, sans le vouloir, il maintient comme contradictoires les deux termes de la relation : participation versus représentation.

Il faut donc commencer une réflexion radicalement nouvelle en politique, il faut repenser la structure même du pouvoir et trouver à tous les niveaux la double nature qui fait sa vitalité : la participation et la représentation.

Tout le politique commence (et finit) par la participation. Contre l'opinion de John Stuart Mill, dans son œuvre Considérations sur le gouvernement représentatif[3], nous soutenons que tout système politique démocratique commence par être celui de la participation directe (seulement possible lorsque la communauté est face à elle-même, dans la base de la société politique, en dessous du niveau de la municipalité ou du comté). Mais, quand le nombre des citoyens augmente, il est matériellement impossible à la participation de produire une gouvernabilité semblable à celle que peut obtenir la représentation en matière de prise de décisions et d'exercice du pouvoir. La participation est donc obligée de penser une autre organisation, possible institutionnellement, de la démocratie participative.

Pour atteindre le consensus politique et permettre la participation de chaque membre singulier de la communauté, il faut introduire des médiations. Cela ne peut se faire qu'au moyen d'un nombre proportionnel et inférieur de représentants. Cette solution n'empêche pas d'avoir une conscience claire que la représentation n'est pas si transparente et adéquate que la participation de chaque membre singulier de façon directe. On peut néanmoins admettre la représentation en assumant les risques que suppose la non identité entre les représentants et les représentés. Ces risques vont se manifester par des dérèglements comme, par exemple, lorsque les représentants n’expriment pas la volonté des membres singuliers qu’ils représentent, dans les organismes créés pour trouver des consensus et aplanir les différences[4]. La représentation est toujours une médiation ambiguë qui peut amener à la fétichisation et à la bureaucratisation, manifestations de la volonté des représentants et non de la communauté des individus singuliers représentés.

Pour ce motif, la représentation, institution nécessaire mais ambiguë, doit être articulée plus amplement avec la participation des citoyens singuliers de base qui procèdent par démocratie directe.

La potentia, le pouvoir politique en soi, qui réside toujours, de façon ultime et exclusive, dans la communauté politique, doit se poser comme pouvoir instituant devant la  potestas (totalité institutionnelle du système politique). La façon de se poser de la communauté politique doit être participative et ce sont ses membres qui doivent prendre les décisions fondamentales de l'ordre politique possible. Ce se poser est ontologiquement un présupposé même si, empiriquement, il se réalise de manière implicite. Dès son origine, toute communauté politique existant réellement a des institutions historiquement organisées (l'espèce homo suppose la quasi institution naissante des primates, celle du mâle dominant). Il est impossible d'imaginer la situation empirique d'une communauté politique sans aucune institution se posant dans la situation de décider quel système politique elle souhaite. Même dans ce cas, le postulat de Francisco Suarez se réaliserait. Le seul régime du gouvernement de droit naturel (antérieur à toute institution ou potestas), antérieur à tout régime historique, est le régime « démocratique », dans la mesure où dans la situation originaire on doit décider démocratiquement le système qu'on va adopter. Mais nous devons ajouter maintenant (une question que, le moderne Francisco Suarez ne pouvait pas imaginer) qu'il s'agit d'une « démocratie participative » qui ne contient encore aucune « représentation ». En effet, la représentation serait forcément le produit d'une décision, ce qui suppose une « participation » préalable.

Ontologiquement l'être humain est physiquement et par son cerveau une chose réelle, singulière, dont l'organisation métabolique ou anatomique s'étend jusqu'aux limites de sa peau, membrane qui délimite le dedans et le dehors du vivant. En tant qu'être vivant il se situe dans un lieu et un temps physique précis qui ne peuvent être occupés par aucun autre corps physique réel. Même à ce niveau ingénu de la réalité de l'être humain en tant que chose, le singulier est en rapport avec d'autres choses réelles (l'univers physique, la terre, les arbres, les animaux et d'autres êtres humains aussi physiquement réels). L'être humain est en rapport avec toutes ces choses d'une façon très différente de tous les autres êtres. Par le développement de son cerveau et de sa subjectivité, l'être humain est la seule chose qui a un monde (dans le sens de Heidegger), mais qui a aussi une intersubjectivité beaucoup plus développée que tous les autres animaux supérieurs. Le monde intersubjectif humain constitue un tout de rapports réels et intersubjectifs, qui suppose l'existence d'une communauté. L'être humain né et se développe culturellement, au sein d'une communauté. Sa relation avec le tout communautaire est un moment constitutif, a priori, de sa propre subjectivité. Par le langage, le singulier communique à l'intérieur de cet horizon. La participation est l'actualité de toutes les pratiques humaines dans lesquelles le singulier se pose comme « part » de ce « tout ». La participation est une praxis communicative, il s’agit de se mettre en communication avec les autres. La participation est donc le premier moment relationnel, réel, de l'être humain singulier avec sa communauté et, en même temps, constitue la communauté en tant que telle. Si chaque singulier refuse d'entrer en communication et de participer dans les actions communes il s'isole et périt, mais la communauté aussi disparaît. La vie humaine est communautaire. Sans cette façon d’agir communautaire il n'aurait pas de vie. Le vivant est le produit des multiples fonctions qui sont accomplies de façon communautaire, ce qui rend impossible sa vie solitaire. L'« être communautaire » est la participation, c'est-à-dire le fait d’être actuellement une partie du tout, sans lequel on ne peut pas vivre. Être-partie effective du tout, est participer, moment substantiel de l'être humain en tant qu'humain, en tant qu'être communautaire, historique, culturel et politique.

De ce fait, la potentia où le pouvoir politique qui réside dans la communauté même est toujours participation des singuliers dans le tout collectif. Le mot potentia, outre la force, indique la possibilité d'une actualisation future. La participation est justement l'actualisation de la potentia comme puissance (force et possibilité à la fois). Hegel dans sa Logique indique adéquatement que la possibilité (Möglichkeit) est antérieure à la future réalité accomplie (Wirklichkeit), elle est activité (Tätigkeit)[5] (Marx aussi utilise ces distinctions ontologiques dans les Grundrisse, en parlant du travail vivant en tant que puissance ou « possibilité »). De la même façon, la participation des membres d'une communauté politique est, en tant qu'activité, l'exercice actuel de ce pouvoir. Cette activité consiste à poser leur être charnel et concret, leur subjectivité engagée avec celle de tous les autres membres de la communauté pour faire exister la communauté en tant que telle. Une assemblée politique ne peut pas exister sans participants. Ainsi, la participation politique de chaque participant constitue, en acte, l'existence même de la communauté politique. La participation est la forme première de l’être politique et par conséquent du pouvoir politique. Le politique et le pouvoir politique se nouent autour de la participation des singuliers dans le tout de la communauté. Sans participation, le politique disparaît et le pouvoir politique n'a plus de fondement. Participer est prendre en charge la communauté en tant que responsabilité envers les autres. La participation est la première expression de la Volonté-de-Vie. Celui qui s’isole, qui ne collabore pas, qui ne compte pas sur la communauté, n'est qu'un autiste suicidaire. Le refus de participation peut avoir plusieurs causes mais, dans tous les cas, il s'agit de pathologies politiques qu'il faut éviter. Une communauté avec pouvoir politique est une communauté forte, vitale, participative et co-responsable. La Volonté-de-Vie, l'unité résultant du consensus et l'abondance de moyens qui rendent la vie politique possible sont les fruits de la participation active des membres singuliers de la communauté politique.

Le fait qu'un citoyen, exclu ou indifférent, participe à nouveau dans la communauté politique peut s'énoncer de la façon suivante :

si X est le pouvoir politique de cette communauté, « a » l'ordre politique en vigueur, « b » l'ordre politique futur et « 1 », une nouvelle participation) :

(Xa+1 = Xb) > Xa

Cela représente un processus de potentialisation du pouvoir de la communauté (empowerment en anglais). Quand les marginaux, les exclus de la communauté, prennent conscience de l'importance de la participation politique et se lancent collectivement dans la construction créative de l'histoire, le pouvoir des faibles augmente. La participation devient un surplus de pouvoir, l’hyper pouvoir du peuple qui « devient » source créatrice, un pouvoir qui, à travers « l'état de rébellion » commence la transformation de l'ordre politique en vigueur.

Au contraire, le fait qu'un citoyen abandonne la participation dans la communauté politique (par exemple par peur de la répression), peut être énoncé de façon inverse :
Xa-1 = Xb) < Xa

On affaiblit ainsi le pouvoir de la communauté politique et le pouvoir apparent, fétichisé, de la violence dominante, s'impose sur le peuple. La non-participation représente une perte de pouvoir politique.

La participation a donc la signification d'un existentiel (en utilisant une catégorie d'Heidegger). L’être-avec-les-autres (le nous communautaire au-delà du moi, analysé de façon linguistique par C. Lenkendorf au sujet du peuple maya), s'actualise dans la participation. Elle est l’être du politique comme nous l'avons indiqué.

Le développement ultérieur du concept de participation transforme le simple être participatif en fondement, c'est-à-dire qu'elle se pose en tant qu'essence. La participation est l'essence de ce qui apparaît, de façon phénoménologique dans le champ politique en tant que totalité. Tous les êtres politiques sont des phénomènes qui se présentent et se laissent interpréter à partir du fondement. Ainsi, les actions et les institutions, qui apparaissent dans le champ politique en tant que modes de participation, sont différentes manières de participer. Nous disons par exemple qu'il y a des accords qui sont légitimes. La légitimité est un des caractères des accords trouvés sur la base d'arguments et avec la participation symétrique de tous les affectés. Souvent on ne fait pas attention au fait que la participation est le moment essentiel de la légitimité. Sans participation il n'y a pas de légitimité. Ce qui a été décidé sans la présence, sans la participation, de tous ceux qui sont affectés par les décisions et qui de ce fait n'ont pas pu donner le raisons pour arriver à des accords, n'est pas légitime. Tout accord est illégitime en absence des affectés, du fait de leur non-participation. Le fondement de la légitimité est la présence active des affectés (en tant que volonté de participation et avec des raisons qui fondent leurs demandes). Cette présence active dans la communauté de ceux qui peuvent présenter des arguments politiques s'accomplit empiriquement par la participation, par la présence effective, en tant que partie, dans le tout de la communauté. Le concept de symétrie, dont parle l'éthique de la communication, est la forme obligatoire de la participation. Sur le terrain, sans la participation, on ne peut pas parler de symétrie. Ceux qui sont affectés sont ceux qui souffrent les effets négatifs de leur non-participation aux débats qui les a empêchés d'être en mesure de défendre leurs droits. Ainsi donc, le concept de participation est la substance même de la définition du légitime. Cela est tellement évident qu'il ne semble avoir besoin d'aucune autre explication.

On ne peut pas dire de la participation originaire qu’elle est légitime ou illégitime (de la même façon qu'on ne peut pas dire que le travail vivant a une valeur d’échange). Elle se situe à un autre niveau de légitimité puisqu'elle est le fondement ou l'essence de la légitimité. La participation a une dignité (non une légitimité) originaire, elle est souveraine par nature. La souveraineté c’est l'auto référence en acte de la participation de membres la communauté, qui se posent en tant que communauté existante effectivement. La communauté se pose soi-même en tant que souveraine (premier acte) grâce à la participation en acte de ses membres. Elle est le fondement de la légitimité de la représentation (deuxième acte) quand elle décide de créer la représentation comme institution et d’élire les représentants qui exerceront le pouvoir de façon déléguée. La souveraineté elle-même n'est pas légitime, elle est plus que légitime. Ce sont les actes, les effets (loi, institutions, etc.) de la participation en acte, de la souveraineté, qui sont légitimes. La mère n'est pas filiale, elle est le fondement de la filialité de la fille. La participation du citoyen est un droit inaliénable, instituant (et non constituant), il a la dignité propre des acteurs politiques en tant que moment constitutif, substantiel, de la communauté politique.

La représentation vient toujours après. Elle est un moment nécessaire, déterminée par la raison instrumentale, elle se situe seulement dans la potestas, c'est-à-dire dans le moment des institutions créées pour la vie politique. La représentation n’est pas la substance de la vie politique.

La potentia ou le pouvoir politique en soi de la communauté est conçu d'emblée comme participation. Quand la communauté politique des participants se pose en tant que pouvoir instituant (c'est-à-dire quand elle décide de façon participative de se donner des institutions) elle le fait à partir de la participation des membres de la communauté. Ce pouvoir instituant divise déjà la potentia de la potestas. La potestas ou la structure institutionnelle doit être démocratique. Le premier type possible de pouvoir est la démocratie, la démocratie participative, celle qui décide de la nécessité de se donner des représentants afin que l'exercice du pouvoir politique concret devienne possible. Ce pouvoir représentatif a pour essence la représentativité ou la délégation (dans un sens large et non comme mandat impératif) du pouvoir de la communauté à une personne. Il s'agit d'une partie (un singulier) qui représente ou prend la place (en substitution[6]), pour suppléer, le tout (la communauté). Cette façon d'organiser le système politique se nomme démocratie représentative et elle a besoin de légitimité pour pouvoir exercer le pouvoir avec justice et efficacité. On peut ainsi constater que la démocratie représentative n'est plus le synonyme de démocratie en tant que tel mais un moment de la démocratie comme régime intégral, légitime, d'exercice délégué du pouvoir. Ainsi, la potestas, dans la structure institutionnelle politique, se constitue en système complexe et articulé de démocratie participative-représentative, chose que la modernité bourgeoise ou le libéralisme n'a pas su découvrir et moins encore pratiquer. Même la gauche n'a pas su, non plus, la décrire de façon adéquate[7] ce qui l’a amenée parfois à des voies sans issue, à des apories inutiles et à des contradictions avec des résultats lamentables.

La révolution la plus profonde de notre temps, celle du XXIe siècle, sera donc l'évolution des communautés politiques, actuellement organisées en États démocratiques représentatifs, vers l’institutionnalisation de la démocratie participative des majorités pauvres de la société civile. Cela suppose le développement accéléré de la conscience politique du peuple, de sa connaissance des mécanismes institutionnels et des droits pour lesquels il devra lutter. Auparavant en parlant de socialisme on pensait seulement à la pauvreté et l'exploitation de la classe ouvrière et des exclus du capitalisme. Mais, même si cela doit évidemment être aboli, on ne peut pas omettre la critique politique du libéralisme (qui est dans le champ politique un système analogue au système capitaliste dans le champ économique). Cette critique doit être faite à partir de l'exercice du pouvoir politique et moyennant la pleine participation des citoyens (sans négliger la prise de décision participative dans les entreprises, sur le terrain économique). Marx avait découvert la participation dans l'expérience héroïque de la Commune de Paris en 1871, mais il n'est pas arrivé à formuler la question institutionnelle, à travers une théorie politique capable d'articuler la participation avec la représentation. C'est la thèse qu’a démontré Mészàros dans son œuvre « Au-delà du capital »[8]. Cette révolution est plus profonde et d'une portée supérieure, dans la mesure où elle est la condition de possibilité de toutes les autres (et se développe de façon analogue dans tous les champs pratiques). Un peuple, dans l'exercice de sa souveraineté (l'autodétermination politique), peut décider aussi bien de sa politique économique que de sa politique nationale ou internationale.

La question du respect des minorités n'a de véritable solution que par la participation. Si la minorité dans un collège de représentants (une minorité qui peut-être la majorité de la communauté politique) ne peut pas exercer le pouvoir dans les institutions, elle peut toujours avoir recours à la participation en mobilisant ceux qui sont affectés. Même si ceux-ci sont minoritaires dans les organes représentatifs ils peuvent être la majorité dans les rues. En effet, ce sont toujours les majorités qui souffrent des injustices. Mais, il serait évidemment préférable d'avoir des institutions participatives de façon constitutionnelle et légale. Elles pourraient ainsi s'exprimer en exerçant des droits institutionnels tels que la révocation des mandats, ou, dans des institutions de contrôle, pour être respectées et prises en compte dans les organes représentatifs. Sans cette participation active les organes de la représentation n'accepteront jamais les arguments de ce qui apparaît comme une minorité mais qui est, néanmoins, une majorité de fait.

Il s'agit donc d'utiliser l'imagination. Dessiner un système politique plus complexe dans lequel la participation et la représentation auront des  fonctions différentes, mais surtout un système dans lequel la participation sera suffisamment institutionnalisée, quand cela s’avère  nécessaire, à tous les niveaux de l'exercice du pouvoir politique.

Il faut ainsi aller encore plus loin en distinguant trois (et non pas deux) instances de l'exercice du pouvoir (de la potestas). La potestas en tant que totalité institutionnelle a trois instances fondamentales qui n'ont pas été considérées, en tant que telles, par aucune théorie politique moderne. C'est le point de départ de la révolution politique du XXIe siècle.

Les trois instances de l'exercice

En première instance[12], en A, « la participation demande » (première fonction du pouvoir citoyen). La communauté politique, siège du pouvoir politique (potentia) devient un tout auto-conscient qui exige d’elle-même tout ce dont elle a besoin. Les membres de la communauté exposent ses besoins, par l'intermédiaire des organes de la participation institutionnalisée (aux différents niveaux d'exercice du pouvoir). Cette demande s'adresse aux institutions représentatives et à tous les niveaux elle exprime ses exigences matérielles, formelles ou de faisabilité (flèche a). C'est une nouvelle forme de démocratie participative qui demande, dans une instance qu'on peut appeler d'interpellation, qui doit empêcher que ses demandes deviennent des promesses jamais tenues par les candidats des partis. Il s'agit de ne plus laisser à la bonne volonté des gouvernants le moment essentiel, matériel de toute politique, l'accomplissement de la volonté de vouloir vivre, c'est-à-dire la satisfaction des nécessités matérielles de la communauté.

Dans une deuxième instance, en B, « la représentation gouverne » (fonction propre des trois pouvoir, exécutif, législatif et judiciaire). On prend ces propositions, qui sont le contenu même de l'exercice du pouvoir délégué, comme objectifs à réaliser par le gouvernement de l'État. C’est le discours ordinaire de la démocratie représentative, seule expérience institutionnelle valable pour le libéralisme moderne.

Dans une troisième instance, en C, « la participation contrôle » (deuxième fonction du pouvoir citoyen) on observe[13](mais avec un pouvoir effectif, avec une véritable police de contrôle et en dernière instance de coercition même sur la police judiciaire ou l'armée) l'accomplissement par les institutions représentatives des exigences et des besoins posés par la communauté politique. Même le pouvoir judiciaire est observé par le pouvoir citoyen : la fonction de contrôle est supérieure à la fonction judiciaire. La cour suprême constitutionnelle, (dernière instance de jugement de l'ensemble des systèmes politiques de l'État) doit être constituée par des candidats proposés par le pouvoir citoyen et ses membres élus par votation directe de la communauté politique dans sa totalité. Il s'agit de la démocratie participative et de contrôle qui dirige les auditeurs qui, à leur tour, surveillent la représentation.

Est-il possible d'institutionnaliser la participation comme une chose différente de l’institutionnalisation représentative ? À mon avis il existe de nombreuses expériences sur les différents formes d'institutionnaliser la participation (depuis l'assemblée communale de base ou de quartier, jusqu'aux mouvements sociaux les plus divers). Ces formes qui ne répondent pas aux exigences de la représentation telle qu’elle est conçue à partir des partis politiques et de la démocratie représentative (et non pas de la démocratie libérale parce que celle-ci, qui ignore la coparticipation participative, fétichise, de façon inévitable, la représentation).

Différents niveaux verticaux d'articulation possible entre la participation et la représentation dans la démocratie future

Précisions sur le schéma 2. Flèche a : indique la direction ascendante de l'institutionnalisation participative. Flèches b : indiquent  la direction de la proposition (besoins ou demandes) . Flèches  c : indique la direction de la délégation du pouvoir. De 1 à 8 : il s'agit des différents niveaux d'exercice du pouvoir représentatif délégué dans les États. Dans la représentation démocratique le pouvoir délégué doit être exercé comme pouvoir obédientiel (celui qui commande en obéissant). Dans la participation démocratique, le pouvoir participatif exerce le pouvoir souverain (celui qui commande[23] en commandant).

Le niveau 1, comme on peut le constater, est aussi présent dans la démocratie représentative. L'assemblée communale, le district[24] ou l'organisation politico-démocratique directe de base, en dessous de la commune ou du municipal, exerce aussi le pouvoir avec représentation (elle ne remplace pas l'organisation immédiate de la démocratie directe ou les réseaux électroniques que nous examinerons par la suite). Le conseil de quartier ou le conseil communal est un exemple de cette organisation. Ce niveau est objet de louanges, par l'anarchisme, et pour cause. Il constitue la vérité de ce courant. Néanmoins, le problème non résolu de l'anarchisme est celui de l'institutionnalisation des autres niveaux, sans élimination des institutions représentatives.

À son tour, la démocratie moderne ou libérale, organise le niveau représentatif (depuis le niveau 2 jusqu'au niveau 8), mais ignore les niveaux des institutions participatives. Les pères fondateurs des États-Unis avaient une conscience claire de la nécessité d'articuler la démocratie représentative et la démocratie participative. C’était, par exemple, l'idée de Thomas Jefferson. Or ils n'ont jamais réussi à l'organiser dans la mesure où les groupes dominants craignaient la participation démocratique du peuple, majoritaire et nécessairement plus pauvre, dans le système capitaliste. Il faut noter que le système libéral considère le capitalisme comme « la nature même des choses » dans le champ économique, le système libéral étant son complément dans le champ politique. S'il y avait eu une démocratie participative, la majorité des pauvres aurait exercé le pouvoir représentatif. Mais, la représentation habilement « managée » permit à l'élite minoritaire dominante d’exercer toujours le pouvoir représentatif (évidemment non-obédientiel), de l'État. Le caractère non-obédientiel de la représentation s'appuie sur la non-participation réelle et institutionnelle du peuple (exclusion prévue d'emblée dans la constitution politique).

Le pouvoir représentatif se fétichise, se bureaucratise ou se corrompt quand il affirme que le siège ultime du pouvoir (potestas) se trouve dans les institutions représentatives et non dans la communauté politique (potentia). Le pouvoir participatif de la communauté politique ou du peuple peut s'aliéner (mais non se fétichiser) quand il n’a plus conscience d'être le siège ultime de l'exercice du pouvoir, quand il n'arrive pas à décider le meilleur pour soi-même, quand il se trompe dans l'élection des candidats au dans l'élection des représentants, mais surtout quand il n'a pas pu institutionnaliser la participation effective, quotidienne, du peuple. Dans ces cas le sain sens commun du peuple est perdu. Aujourd'hui, un des instruments le plus puissant pour aliéner une communauté lors de l'élection des représentants (qui est un des devoirs[25] de la participation) c’est la médiacratie. De ce fait, la lutte du peuple pour récupérer le contrôle des médias est essentielle pour une démocratie réelle. Le moyen de démocratiser les médias (qu'on ne peut pas laisser exclusivement entre les mains des capitalistes privés) est la participation des différentes institutions de la société civile et politique dans la création et l'utilisation des moyens électroniques de communication. Cela suppose la création de réseaux de radio et de télévision, d'information, de débat, d'études, etc. C'est l'exemple de la république Argentine où une loi prévoit que 33 % de ces médias reviennent aux communautés populaires, 33 % à l'État représentatif et 33 % aux médias privés (nationaux et transnationaux). Il s’agit d'une nouveauté digne d'être imitée.

Néanmoins, la véritable révolution est celle des moyens électroniques de communication, des réseaux entre les mains des citoyens, qui permettent, à chaque instant, à des millions de participants de connaître, débattre et décider des actions communes. Cette révolution technologique est même plus importante que la Révolution industrielle produite par la machine à vapeur dans le champ économique. Ce sont ces moyens de communication électronique qui ont permis l'état de rébellion des citoyens, lassés de la corruption et le monopole dans l'exercice du pouvoir politique. C‘est un contre-pouvoir politique entre les mains des institutions représentatives. Depuis la place Tahrir en Égypte jusqu'à la Puerta del Sol en Espagne, c'est une Révolution communicationnelle entre les citoyens, qui transforme la façon de prendre des décisions dans le champ politique. Cette révolution électronique de la communication est plus importante que la Révolution industrielle dans la mesure où elle touche les rapports humains, et de ce fait la sphère où se prennent les décisions économiques qui sont, en dernier ressort, politiques.

Citoyens opprimés du monde, organisons la participation en réseaux électroniques et nous serons des millions !

Nous serons des millions à communiquer de façon instantanée, en temps réel, partout dans la Terre ! Nous pourrons ainsi défaire la bureaucratie,  la représentation politique corrompue et les minorités élitistes, associées aux bureaucraties financières et capitalistes transnationales, qui exploitent à tous les peuples du monde même en Europe et aux États-Unis.

Pour atteindre ces objectifs on doit institutionnaliser la participation et articuler la démocratie représentative avec la démocratie participative.

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Mészáros, I., 2006, Más allá del Capital, Vadell Hermanos Editores, Caracas. Premio Libertador al Pensamiento Crítico.

Mill, John Stuart, 2009, Considérations sur le gouvernement représentatif, Gallimard, Paris.



[1].Le Surveiller et punir de Foucault apparaît ainsi, non pas comme domination du haut vers le bas, mais comme justice du bas vers le haut. Il donne du contenu au gouvernement et empêche l'impunité en cas de corruption ou fétichisation du pouvoir (ce qui est l’illégitimité de l'exercice délégué de la représentation).

[2]. Voir thèse 3 de20 tesis de política (Dussel, 2006); et au § 14.2, de Política de la Liberación (Dussel, 2009), vol. 2, [259ss], pp. 59ss.

[3]. J. S. Mill, Considérations sur le gouvernement représentatif, 1860, trad. fr. P. Savidan, Gallimard 2009.

[4]. Pouvoir présenter des propositions bien pensées, fondées et globales, exige des écoles politiques et des associations permettant de présenter ce genre de projets. C'est le rôle de partis politiques. S'il existe un seul parti il aura forcément un seul projet même si sa direction prétend qu'il y a différents courants. Si vraiment ces courants ont de l'autonomie ils seront de fait des partis politiques. Or, l'expérience du socialisme réel va dans le sens contraire. D'ailleurs les représentants, mêmes quand il existe des courants, n'ont pas été élus par la communauté politique, en tant que membres des courants et des projets différenciés. Cette absence de pluralité invalide la démocratie représentative et en même temps ne suppose pas, en l’absence d'institutions pour permettre son exercice, une participation pleine et entière. Il faut débattre honnêtement de ce sujet dans les gauches latino-américaines actuelles.

[5]. Voir dans la Lógica pequeña, dans la Enciclopedia, § 144ss; en Hegel, 1970, vol. 8, p. 284ss, et au même endroit dans la Lógica de 1812-1816.

[6]. Quand cette substitution se produit dans « le temps messianique restant » (penser à W. Benjamin ou G. Agamben), elle signifie se placer à l'endroit de la victime devant le « peloton d'exécution » dont nous parlait personnellement E. Levinas à Louvain en 1972.

[7]. C’est  le résultat d'une défiance compréhensible envers la représentation libérale bourgeoise, que la gauche critique à partir de l'horizon d'une impossible participation, non institutionnalisé (la démocratie participative directe), dans les quatre niveaux d'exercice du pouvoir de l'État.

[8]II, cap. 11, y IV, cap. 3 (Mészáros, 2006).

[9]. Dans le cas du Venezuela les demandes ou les besoins doivent être planifiés. Cela se fait à travers la “Ley orgánica de la planificación pública y popular”, in Gaceta oficial (Caracas), nr. 6.011, December 21, 2010.

[10]. Les zapatistes au Chiapas ont énoncé deux principes opposés : parmi ceux qui exercent le pouvoir « commander en commandant » ou « commander en obéissant ». Les deux concernent le pouvoir représentatif. Le premier est la domination fétichisée, le deuxième le pouvoir au service du peuple. Mais du point de vue du peuple, en tant que pouvoir participatif, il est celui qui commande en commandant, tandis que le pouvoir représentatif doit commander en obéissant.

[11]. La fonction de contrôle exercée par la participation institutionnalisée, a été légalisée au Venezuela par la “Ley orgánica de la Contraloría social”, en la Gaceta oficial, nr. 6..011, 2010.

[12]. On peut consulter tout ce qui concerne l'institutionnalisation de la participation au Venezuela dans une publication conjointe de Leyes del Poder Popular, Asamblea Nacional, Talleres Gráficos, Caracas,  2011; voir aussi Víctor Álvarez R., 2010, Del Estado burocrático al Estado comunal, Editorial Horizonte, Caracas.

[13]. Il faut distinguer clairement l'action judiciaire (le procès) développée par le pouvoir judiciaire, des actions de contrôle (l’observation souveraine) du pouvoir citoyen. Le pouvoir d'observer peut conclure à la nécessité d'un « jugement » (par exemple la « révocation du mandat » d'un représentant et même d'un juge du pouvoir judiciaire y compris la plus haute instance de la Cour suprême de justice). Il faudra préciser de quel genre de jugement il s'agit et qui le prononce. Ce pourrait être le même Pouvoir Judiciaire sous certaines conditions ou une Cour Suprême Constitutionnelle dépendante du Pouvoir Citoyen. Néanmoins il ne peut s'agir, en aucun cas, d'un jugement populaire immédiat ou de lynchage. La gouvernance de la représentation doit être assurée de façon équilibrée avec la participation de la communauté politique. Les institutions de la participation font des « audits » avec force de loi.

[14]. Il existe des organisations au niveau global (tel que l'ONU) et des organisations régionales, internationale ou continentales comme la Communauté Européenne ou celles de l'Asie, l'Afrique ou l'Amérique latine.

[15]. Il est erroné de parler de certains États comme États nationaux. Il s'agit souvent d'États «plurinationaux » (tel que l'État bolivien). On devrait donc parler d'État fédéral ou d’Union d'États provinciaux (tel que les États-Unis). Au Venezuela le pouvoir participatif suprême, au niveau fédéral, est le Pouvoir citoyen. L’État vénézuélien a cinq pouvoirs et non trois comme c'est le cas pour les régimes issus de la Révolution française (pouvoir exécutif, législatif , judiciaire, pouvoir électoral et pouvoir citoyen). On peut consulter la Constitution de la République bolivarienne du Venezuela, promulguée les 24 mars 2000, titre V, chapitre IV, article 273-291 : « Du Pouvoir citoyen ».

[16]. Aussi nommé « État » (par exemple et l'État Sinaloa au Mexique). Il est constitué de Municipalités, de Comtés, des Délégations ou des institutions équivalentes.

[17]. Ce sont les institutions représentatives de chaque niveau, du Conseil communal (1) jusqu'au Pouvoir citoyen (6).

[18]. Aux États-Unis ils sont appelés Comtés, dans le district fédéral de Mexico c'est la Délégation, etc..

[19]. Voir la “Ley orgánica de las comunas”, déjà citée.

[20]. Voir titre IV, chapitre II, de la “Ley orgánica de las comunas”. Dans le chapitre I on trouve des références au Parlement de la commune qui serait déjà une institution représentative à ce niveau.

[21]. Il s'agit déjà d'une institutionnalisation de la participation. C'est l'essence même, en dernière instance, de toute la politique. C'est le cas d'l'Assemblée du quartier, des communautés qui n'ont pas de Municipes  ou des Comtés. C'est le district ou, plus bas encore, la communauté de base.

[22]. La loi du Pouvoir populaire organise des audits à tous les niveaux, depuis la commune jusqu'au Pouvoir citoyen. Les auditeurs sont des corps techniques, au service des institutions de participation, pour le compte desquelles ils surveillent et punissent la représentation, depuis les Conseils de quartier jusqu'au Président de la République. Ils peuvent décider la « révocation du mandat » dans des cas extrêmes. C'est la seule solution contre l'impunité et la corruption de la représentation à l'échelle du monde.

[23]. Ce commandement n'est pas le fait de la représentation (il n'est pas par conséquent fétichisé), celui qui commande le fait en son propre nom, en tant que participation, fondement de toute légitimité.

[24]. Aux États-Unis.

[25]. Il s'agit d'un véritable devoir et par conséquent c’est obligatoire. Il s'agit de l'acte par lequel les citoyens délèguent le pouvoir, ce qui lui donne une importance particulière. Le libéralisme manipule ce devoir en le présentant comme un simple droit facultatif. De la même façon que le respect du code de la route n'est pas facultatif, le devoir d'élire les représentants l'est encore moins.